Cet article est déduit de celui de
la dépêche du midi
paru ce 10 mars.
Il n'est pas question de revenir sur l'article en lui même (par ailleurs assez complet et bien écrit) mais sur son fondement et ses répercutions.
Pour faire simple, plusieurs tribunaux (1 administratif, 1 en correctionnel et 1 en appel) ont jugé que le poker n'est pas un jeu de hasard. Les mis en cause (pour différentes raisons) étaient donc relaxés au motif que la loi du 12 jullet 1983 qui régit les jeux de hasard n'était pas applicable au poker. En fait il y a eu un 4ème jugement qui me concernait directement avec mon ami Didier, fondateur de Provence Poker, mais j'y reviendrai plus tard.
Se basant sur ces décisions de justice importantes mais pas "jurisprudentielles", des associés ont décidé d'ouvrir à Toulouse un cercle de jeu qui n'était pas autorisé. Fort de ces décisions (du moins ils le pensaient), ces personnes ont pensé être dans la loi en proposant du poker payant avec rake, paiement en argent et dotation.
Sauf qu'en octobre le conseil d'état, la plus haute juridiction, a confirmé qu'en l'état actuel de la loi (c'est très important), le poker était un jeu de hasard donc la fameuse loi citée ci dessus était applicable. Le club Wilson (le fameux club qui n'a rien d'un club) n'en a pas tenu compte ou pense encore pouvoir se défendre mais le résultat est là : depuis des mois la gendarmerie a enquêté et a trouvé tous les éléments de tenue de maison de jeu de hasard. Le club est fermé, les associés vont passer en correctionnelle et de mon avis de non juriste mais qui suit ces questions (pour le CdC notamment), je ne vois pas comment ils peuvent s'en sortir.
Donc : le conseil d'état est l'autorité suprême. Il ne juge que sur la loi et son application sans tenir compte des plaidoiries. Mais sa parole est quasi celle de dieu.
Il dit que le poker, en l'état actuel de la loi (je vous passe les détails, la décision doit être basée sur des textes du 19ème siècle mélangés à ceux de 2010 sur l'ouverture du poker en ligne en France) est un jeu de hasard.
Les conséquences : tout tournoi qui aurait une suspicion des 4 conditions cumulatives (notez le "cumulatives") sera soupçonné d'être illégal et donc potentiellement soumis à poursuites judiciaires.Notez aussi qu'il suffit qu'un procureur pense que les conditions soient réunies pour que les organisateurs soient devant un tribunal. J'en reviens brièvement à mon cas personnel : certes j'ai profité de la fausse jurisprudence créée par les tribunaux qui ont déclaré que le poker n'était pas un jeu de hasard (mon jugement s'est passé un peu avant la décision du conseil d'état) mais surtout à ma connaissance, le projet que nous avions monté est le seul qui dans un jugement en relaxe bénéficie de décisions complémentaires montrant que même si le poker avait été déjà à cette époque considéré comme un jeu de hasard, les 4 conditions cumulatives n'étaient pas présentes (un peu d'auto satisfaction ne fait pas de mal, notre séjour poker en Corse était bien monté et ceux qui étaient présents pourront le confirmer).
Les 4 conditions cumulatives :
- Tournoi (ou partie) ouvert au public
- Publicité sur le tournoi
- Paiement obligatoire pour participer
- Dotation sur le tournoi/la partie
J'ambitionne pas de faire de nos lecteurs des spécialistes du droit sur le poker mais de donner des infos sur la législation qui nous est appliquée. Mieux, montrer ce qui est à mon avis une incohérence totale, même 2 :
- la loi définit le poker comme un jeu de hasard, le conseil d'état l'a confirmé. Mais la loi peut être changée et considérer que le poker est un jeu où le hasard apparait mais n'est pas prédominent.
- plutôt que de dire ce qu'il est interdit de faire, on peut pas définir ce qu'il est autorisé de faire pour qu'un tournoi soit légal ? Cela simplifierait les choses pour les responsables de clubs, pour les juges...
Le point qui pourra confirmer les choses (pas les simplifier...) : dans la future loi sur la consommation qui doit être votée prochainement un article concerne le poker indirectement. Il dit que tout jeu d'argent où une part de hasard intervient, quelle que soit cette part de hasard, il doit être soumis à la loi sur les jeux de hasard.
En gros c'est pas gagné, les clubs devront toujours faire attention à ce qu'ils font en live, peut être même plus qu'avant parce qu'ils peuvent organiser des tournois litigieux et être déjà sous enquête. Mais c'est pas perdu car le dialogue est toujours en place entre l'association nationale et les pouvoirs publics.
Si vous avez des questions....